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SUSTAINABILITY | ARTICLE – 5 Min

Explorer le marché de la compensation carbone : Enjeux, réformes et avenir

By THIBAUD CLISSON 28.03.2023

Dans cet article

    Le marché de la compensation carbone volontaire a récemment fait l’objet de critiques à la suite d’une étude accusant de nombreuses compensations d’être sans valeur. Thibaud Clisson examine de plus près le marché de la compensation carbone, son utilité et les travaux en cours pour améliorer son intégrité.  

    Les crédits de compensation carbone, ou crédits carbone, peuvent être considérés comme des autorisations permettant à leur détenteur d’émettre une certaine quantité de gaz à effet de serre à un certain prix. Les crédits concernent des tonnes d’équivalent dioxyde de carbone (tCO2e) et les marchés du crédit carbone ont connu une croissance rapide à mesure que la course vers « net zero » s’accélère et que les entreprises et les gouvernements s’engagent à atteindre leurs objectifs pour les prochaines décennies.

    Le marché de la compensation carbone volontaire, qui permet aux participants d’échanger des crédits carbones, a suscité un intérêt accru. Il a quadruplé en valeur et a presque doublé en volume pour atteindre 2 milliards de dollars en 2021, avec 166 millions de tonnes d’émissions de carbone évitées ou supprimées. Le marché devrait atteindre entre 10 et 40 milliards de dollars d’ici 2030.[1]

    Malgré cette croissance, les émissions de gaz à effet de serre[2] ne sont pas encore en voie d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris visant à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C d’ici la fin du siècle : ils ont été estimés à 40,5 Gt de CO2 en 2022.

    En outre, un article de presse récent, basé sur une enquête du journal britannique The Guardian, l’hebdomadaire allemand Die Zeit et SourceMaterial[3] , une organisation de journalisme d’investigation à but non lucratif, dans l’une des plus grandes entreprises de normes de crédit carbone, a remis en question le concept même de crédit carbone.

    L’enquête conjointe a révélé que des millions de crédits carbone ont apparemment été vendus sur plusieurs années alors qu’ils n’auraient jamais dû exister. Le rapport indique que de nombreux projets de conservation des forêts ont largement surestimé la quantité d’émissions qu’ils évitent ou suppriment parce que les règles appliquées par Verra, le certificateur le plus important du marché, leur permettent de le faire. Et parce que la supervision n’a pas été à la hauteur.

    Une équipe de recherche mondiale a examiné 29 des 87 projets de conservation des forêts actuellement certifiés par Verra. L’analyse des données indique que plus de 90 % de l’ensemble des crédits carbone émis par ces projets sont sans valeur. Ils semblent être des « crédits fantômes » – ils ne conduisent pas à une véritable réduction des émissions et peuvent même aggraver le changement climatique.

    Verra a déclaré que les allégations selon lesquelles les projets REDD certifiés par Verra émettaient systématiquement et substantiellement trop de crédits carbone étaient incorrectes et fondées sur des études qui avaient mal calculé l’impact des projets REDD de manière significative. La société a déclaré que ses méthodologies utilisent les connaissances scientifiques et technologiques les plus avancées pour s’assurer que les calculs des crédits carbone soient solides et crédibles.

    Toutefois, l’incapacité à réduire les GES mondiaux en plus des controverses sur l’impact réel et l’efficacité des crédits carbone volontaires a soulevé des questions concernant le rôle des marchés de compensation volontaire.

    Nous pensons néanmoins que les crédits carbone restent un outil utile pour évaluer les externalités. Ils peuvent présenter une utilité dans la prise de décision et favoriser une allocation appropriée du capital et des ressources.

    Améliorer la fiabilité et la confiance

    Outre REDD+ (Réduction des émissions provenant de la déforestation et de la dégradation des forêts), d’autres types de compensations incluent les projets de boisement, de reboisement et de revégétalisation (ARR), les crédits de carbone de biochar, les compensations pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone et les compensations pour le captage direct de l’air.

    Des mesures sont prises pour améliorer la transparence et la confiance dans le marché, avec deux organisations: le Conseil d’intégrité du marché volontaire du carbone (« Integrity Council for the Voluntary Carbon market », ICVCM) et la Initiative d’intégrité du marché volontaire du carbone (« Voluntary Carbon Markets Integrity Initiative », VCMI).

    L’ICVCM est un organe de gouvernance indépendant qui cible l’offre sur le marché du carbone. Son objectif est d’homogénéiser la réglementation régissant les émetteurs sur le marché mondial du crédit carbone volontaire en créant un cadre construit à partir de ses principes fondamentaux en matière de carbone.

    La VCMI cible la demande du marché. Elle a pour objectif de fournir des conseils aux entreprises acheteuses afin de s’assurer que leurs revendications écologiques sont satisfaites. Cela revêt une importance particulière compte tenu de la nouvelle directive sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (directive CSRD), entrée en vigueur dans l’UE en janvier.

    La directive CSRD demande que les grandes entreprises de l’UE publient des informations, notamment sur leurs initiatives en matière de compensation des émissions de carbone. Ces informations devraient permettre d’accroître la transparence et obliger les entreprises à rendre des comptes, en permettant aux acheteurs de faire preuve de diligence et de trouver des systèmes de compensation de haute qualité.

    Il existe par ailleurs un Groupe de travail sur le développement des marchés volontaires du carbone (« Taskforce on Scaling Voluntary Carbon Markets »). Cette initiative menée par le secteur privé vise à créer un plan d’action pour la mise en place d’un marché volontaire du carbone efficace et efficient.

    En 2022, le « règlement » de l’article 6 de l’Accord de Paris a été finalisé, permettant aux pays d’échanger des crédits carbone issus de la réduction des émissions afin d’aider les autres pays à atteindre leurs objectifs climatiques.

    Cet environnement pourrait conduire le marché à devenir plus fiable et plus efficace. Il s’agit, selon nous, d’un prérequis pour faire des crédits carbone un outil efficace pour aider le monde à atteindre l’objectif de la neutralité carbone.

    Conclusion

    Nous pensons que les mesures visant à réduire les émissions de GES doivent être la priorité et que les compensations carbone doivent être utilisées uniquement en dernier ressort. Les marchés de la compensation carbone volontaire peuvent jouer un rôle important dans la tarification des externalités telles que les émissions de GES, mais des mesures doivent être prises pour renforcer la confiance dans leur efficacité.

    BNP Paribas Asset Management a compensé l’empreinte carbone de certains fonds (un peu moins de 2 milliards d’euros d’actifs sous gestion) via des crédits carbone volontaires. Toutefois, en tant que membre de l’initiative Net Zero Asset Managers (NZAM), nous ne pouvons pas juste compter sur les crédits carbone pour mettre en œuvre nos engagements en matière de neutralité carbone, mais nous pouvons utiliser les compensations comme un complément. 

    [1] Understanding the Voluntary Carbon Market | BCG

    [2] Analysis: Global CO2 emissions from fossil fuels hit record high in 2022 – Carbon Brief

    [3] SourceMaterial publie des rapports sur le changement climatique, la corruption et la démocratie et est financé par la Fondation européenne pour le climat et la Fondation Grantham

    Avertissement

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    Risque lié à la prise en compte de critères ESG : l'absence de définitions et de labels communs ou harmonisés concernant les critères ESG et de durabilité au niveau européen peut entraîner des approches différentes de la part des sociétés de gestion lors de la définition des objectifs ESG. Cela signifie également qu'il peut être difficile de comparer des stratégies intégrant des critères ESG et de durabilité dans la mesure où la sélection et les pondérations appliquées à certains investissements peuvent être basées sur des indicateurs qui peuvent partager le même nom mais ont des significations sous-jacentes différentes. Lors de l'évaluation d'un titre sur la base de critères ESG et de durabilité, la société de gestion peut également utiliser des sources de données fournies par des prestataires de recherche ESG externes. Compte tenu de la nature évolutive de l'ESG, ces sources de données peuvent pour le moment être incomplètes, inexactes ou indisponibles L'application de normes de conduite responsable des affaires ainsi que de critères ESG et de durabilité dans le processus d'investissement peut conduire à l'exclusion des titres de certains émetteurs. Par conséquent, la performance du FCP peut parfois être meilleure ou moins bonne que la performance d’OPC dont la stratégie est similaire.

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